... surtout en cette période de culture post-chrétienne qu’est le XXIe siècle, obligeant chaque leader à user de sagesse face à ces questions pour engager son équipe éducative, voire son comité, dans un processus de réflexion rigoureux.
Article du magazine CSE, volume 18 n°3, page 18. Traduit de l’anglais par Christiane HEGE.
En dépit des débats passionnés qui ont eu lieu au sujet des écoles du 21ème siècle, il semble que les choses aient peu progressé : Derek Bok, l'ancien président de l'Université Harvard, a comparé la difficulté de réformer l'enseignement à celle de faire bouger un cimetière ! Il ressemble en grande partie à ce qui se faisait il y a 35 ans :
Tandis que certains se désolent de l’immobilisme et des changements trop timides, je propose une autre façon de voir les choses. Préserver des idées majeures et la transmission de la connaissance à la génération future n’est pas quelque chose que l’on puisse bâcler ou précipiter. Nul doute qu’il existe des lacunes sérieuses, tant au niveau du système que de la structuration, auxquelles il est nécessaire de remédier. Cependant, dans le cadre de cet article, je me concentrerai sur le style de direction.
Plus particulièrement, je voudrais aborder trois questions nous permettant d'évaluer dans quelle mesure nous sommes prêts à être des dirigeants d'une école chrétienne.
En 1962, le premier fil d'une tapisserie qui n'allait pas tarder à se dévoiler était retiré : la prière fut bannie de l'école et l’on contesta la liberté religieuse. De ce fait, les parents commencèrent à inscrire leurs enfants dans des écoles chrétiennes. Celles-ci crûrent rapidement avec une remarquable autonomie éducative en termes d'enseignement, de pratique pédagogique ainsi que d'expression de la foi.
Néanmoins, il apparaît maintenant que ces libertés sont toutes relatives. Beaucoup pensent que ce à quoi nous assistons dans les écoles publiques se fraye un chemin dans les écoles privées.
Aussi longtemps que nos valeurs chrétiennes n'empiètent pas sur ce que d’autres estiment comme relevant de leurs droits civiques, tout ira bien. Par contre, si vous refusez d'embaucher un enseignant ou d’inscrire un élève en raison de valeurs ou de choix de vie contraires à ceux décrits dans la charte de votre école, il y a fort à parier que votre école aura des ennuis.
Alors que la transmission d’une vision chrétienne du monde est essentielle, il est impératif d’étudier aussi l’impact de la réalité d’une culture post-chrétienne sur la façon de gérer l’école chrétienne.
Comment votre financement évoluera-t-il si les aides de l’Etat cessent (lorsqu’elles existent…) ou si, plus grave encore, des taxes sont imposées ?
Qu’allez -vous faire le moment venu si les universités publiques n'admettent plus vos élèves en raison de leurs convictions chrétiennes ?
Cette éventualité n'est pas tirée par les cheveux. Le directeur d'école chrétienne du 21e siècle devra user de sagesse pour gérer ces questions et engager son équipe éducative, voire son comité, dans un processus de réflexion rigoureux.
En plus des défis culturels d'une société post-chrétienne, les réalités économiques montrent que l'éducation chrétienne devra affronter une économie de marché bien plus compétitive que par le passé. Des responsables d'écoles prospères qui affichent intelligemment leurs convictions et qui entretiennent des relations de qualité avec leurs partenaires seront des dirigeants efficaces.7
Considérons le fondement de l'enseignement chrétien sous deux angles : fournir à tout prix un programme éducatif solide et une formation enthousiasmante à la foi.
Le cœur de notre action est enseigner et apprendre. C'est pourquoi il est évident que la solidité de notre enseignement repose sur la qualité de l'équipe éducative. On estimait autrefois que les meilleurs enseignants étaient nés avec cette vocation. En d'autres termes, le don de conduire une classe et d'influencer puissamment les élèves était inné. Toutefois, la recherche mène à une autre façon de voir.
Les professeurs les mieux formés dans le monde sont ceux qui ont les élèves avec les meilleurs résultats. Une large variété d'études montre qu'une culture de formation axée sur la croissance des enseignants produit les meilleurs résultats. L'élément-clé d'un programme académique solide est l'équipe éducative. Il faut que nos enseignants soient bien rémunérés et que nous puissions leur fournir des formations professionnelles de grande qualité.
Lorsque des enseignements solides sont enracinés dans un engagement chrétien inébranlable, nous avons une offre de formation d'une valeur exceptionnelle. L’enseignement chrétien dans l'école débute par la compréhension de l'importance de la communauté chrétienne. C'est pourquoi, alors que nous veillons à avoir des temps communautaires d'adoration et d’enseignement biblique, il importe d’avoir une discipline et une culture scolaire centrées sur la grâce qui permettent aux élèves de poser des questions ardues et de se confronter à des idées controversées aux côtés d'enseignants exceptionnels. La formation de la foi s'exprime aussi en une compréhension profonde quant à la manière dont l'évangile engage toutes les sphères de notre vie.
Les élèves des écoles chrétiennes prospères ont des enseignants qui les invitent à découvrir les merveilles de la science, de l'art, des mathématiques et de l'histoire par le regard de leur Créateur. Ces mêmes enseignants invitent leurs élèves à se voir comme des leaders dans l’univers des idées qui impactent le monde.
Ensuite, une fois que notre fondement est posé, il nous appartient de trouver des solutions innovantes pour créer un lien avec les utilisateurs. John Maxwell dit que tandis que "tout le monde communique, peu se connectent aux autres". Il explique : "Être connecté est la capacité de s'identifier à autrui en créant des relations. [..] Pour connaître le succès [..] il faut apprendre à se connecter." (Maxwell 2010, 3) Ceci est valable non seulement pour le responsable au niveau personnel, mais également pour toute son équipe éducative.
Des établissements connectés avec des parents (réels ou potentiels) présentent trois caractéristiques exceptionnelles.
♦ Tout d'abord, ils comprennent que l'école existe comme un complément de l'éducation parentale instituée par Dieu, et non pas pour prendre sa place. Ils créent une culture de service et sont attentifs au moindre détail de la vie scolaire.
♦ De plus, ils font tous leurs efforts pour élever la qualité du vécu au niveau enseignement-apprentissage. Un certain établissement va jusqu'à déclarer que ses enseignants sont "les héros" et que les autres membres de l’équipe (y compris l'équipe dirigeante) en sont les "auxiliaires". Ces descriptions originales soulignent le fait qu'une école est déterminée par le niveau de son équipe éducative.
♦ Enfin, même lorsque l’offre éducationnelle est de valeur forte et que le directeur de l'école est compétent en termes de relations publiques, il est important de garder l’objectif primordial d’obtenir de bons résultats. Autrement dit, les écoles qui réussissent sont celles qui font les bonnes choses au bon moment.
Peter Drucker est l'un des théoriciens les plus influents en ce qui concerne la productivité dans l’Histoire. Dans sa thèse Le cadre efficace (2002), il relève plusieurs qualités que chaque directeur d'école chrétienne du 21ème siècle devrait développer.
Premièrement, avant même le début de la semaine, il faut gérer notre temps avec soin, établir un planning précis décrivant le contenu de chacune de nos heures. C’est une question d'organisation chrétienne. Ephésiens 5:15-16 nous dit de racheter le temps. Le terme employé ici pour le temps se rapporte à une certaine portion du temps liée à un appel divin spécifique.
Ensuite, il faut impérativement se concentrer sur les résultats, mesurer ce qui a de l’importance. Les résultats d'examens, les changements dans le caractère et le niveau atteint par notre école, tout cela devrait pointer vers l’excellence !
Troisièmement, nous devons avoir une vision claire de nos buts et objectifs. Notre stratégie doit s'étendre sur plusieurs années et comporter des buts annuels (agenda administratif annuel). Chaque membre du groupe de responsables devrait avoir un planning mensuel ou trimestriel qui lui serve de guide pour son travail.
Voilà les éléments stratégiques pour la bonne croissance d’une école. Un directeur consciencieux d'une école chrétienne du 21e siècle aura les compétences nécessaires pour réussir au sein d'un environnement souvent défiant.
James Kouzes et Barry Posner affirment : « Ce que vous laissez en héritage est la vie que vous menez » (2006, 177). C’est à cela que l'apôtre Paul devait penser lorsqu'il a dit à Timothée : « Ce que tu as entendu de moi en présence de nombreux témoins, confie-le à des hommes fidèles, qui soient capables de l'enseigner aussi à d'autres » - 2 Timothée 2:2.
La vie de Jésus témoigne de l'héritage le plus profond de toute l'Humanité. Il y a trois leçons que Sa vie nous laisse et que nous pouvons imiter.
En tant que leaders d'écoles en ce 21e siècle, il nous faut suivre l'exemple de Jésus. Il fit face à l'opposition des chefs politiques et religieux de Son temps. Il demeura cependant inflexible. Il agissait dans un environnement hostile, de façon isolée, sans ressources et constamment sollicité. Néanmoins, Il poursuivit Ses objectifs sans discontinuer. Et finalement, Il laissa un héritage qui changea irrémédiablement le monde, à jamais.
Steve D.Whitaker est le mari de Tricia Dawn Whitaker et l'heureux papa d'Amanda, Stephen et Caleb. Il est le directeur de l’Université « First Academy » à Orlando, en Floride. Il est aussi pasteur dans l'église baptiste de Orlando. Le Dr Whitaker fait partie du comité de l'ACSI depuis 2008.